Chargée comme une mule, je me dirige vers la sortie de l’aéroport international Louis Armstrong. Il faut vraiment que je renvoie les « au cas où » en France. Dans le hall, la statue géante du trompettiste en pleine improvisation me salue. Les portes électriques s’ouvrent et je prends en pleine face l’étouffante moiteur de la ville. Saisissant (au sens culinaire du terme…). Il faisait à peine 0°C ce matin à Baltimore quand je quittais Jamison ; New Orleans, elle, m’accueille avec 25 degrés de plus ! Choc thermique, première. Autour de moi, de nombreux passagers en transit. Je louche sur leurs shorts et leurs tongs. Choc thermique, deuxième. De tout mon accoutrement washingtonien, j’abandonne mon écharpe, mon bonnet et mes gants. Manteau, Keele hoodie et autres super couches sont emprisonnés sous les sangles de mon sac à dos. Je ferai avec. Choc thermique, troisième.
Les arrivants s’entassent dans les shuttles* à $15 vidés par les partants. Je leur préfère le bus E2 à $1.10 ! Même trajet, même durée, mais public. Autre transport, nouvelle rencontre. Jim, un jeune doctorant en mathématique de l’Université Tulane (établissement privé et concurrent de l’Université de New Orleans), désigne les canaux qui longent la route. Je suis dans la ville depuis à peine une heure et déjà Rita, Katrina et Gustav** me sont présentés. La ville est située sous le niveau de la mer (60 cm environ). Ces voies fluviales servent donc d’évacuation quand le Mississipi, au sud, et le lac Pontchartrain, au Nord, prennent trop de hauteur. Jusqu’au jour où…
Je quitte Jim et le bus sur la Tulane avenue. Une marée humaine déboule à chaque coin de rue. Encore des shorts et encore des tongs. Mais cette fois-ci, leurs propriétaires ressemblent davantage à des supporters, à en croire la couleur rouge uniforme de leurs t-shirts, les boissons certainement alcoolisées dans leurs mains et les chants qu’ils reprennent en cœur. Ils me font face, me frôlent et me passent. Je dégouline.
Deux blocs plus loin, j’arrive sur Canal Street, l’artère principale de New Orleans. Un streetcar*** à l’ancienne est à l’approche. J’accélère le pas pour ne pas le manquer. La nuit est tombée. Les palmiers encore en tenue de Noël (nos sapins à nous en quelque sorte) éclairent les rames du tram néo-orléanais au centre de l’immense avenue. A gauche et à droite, les voitures apparaissent au compte-goutte. Elles redoutent certainement la foule. Les trottoirs gigantesques apportent une touche hollywoodienne, tout comme les buildings qui entourent Canal Street. Leurs enseignes kitchissimes complètent le tableau typique d’une ville estivale américaine. L’air lourd est quasi irrespirable.
Le streetcar est en gare. Les portes de bois coulissent tant bien que mal. Le véhicule est bondé. Qu’importe, j’impose mon volume. Je dégaine péniblement le dollar vingt cinq pour la course et me cale dans un trou. Et l’on passe les rues les unes après les autres. Des étudiants avinés chantent à la gloire de leur équipe. Je ne sais pas encore qui, je ne sais pas encore quoi, mais il semble que c’est l’événement de l’année. South Lopez en vue, c’est pour moi. Je saute littéralement du tram et fourni un dernier effort pour atteindre l’India Hotel. Au coin de la rue, une église hispanique. En face, ma maison pour les six prochaines nuits est parée de drapeaux de tous les pays. De la musique s’échappe, des rires se font entendre.
Je grimpe les quelques marches et pénètre dans le sanctuaire. Partout des photos, des peintures, des cadres, des sculptures, des colliers. Je jette mon sac au pied du comptoir. Visiteurs du passé et locataires du présent ont laissé leurs traces, leurs empreintes sur les murs de l’hôtel. Mélange entre fraternité étudiante et hippies sur le retour, la maison ne laisse pas indifférent. Check in et visite rapide. Apparemment, j’ai choisi la bonne heure pour arriver… C’est du football américain. Le Sugar Bowl, finale du championnat universitaire, entre Utah Utes et Alabama Crimson Tide. Et le match se joue au Louisiana Superdome ! Comment ai-je pu passer à côté de ça ! Je lâche mes affaires dans le dortoir qui m’est attribué et l’on me presse pour regarder le match dehors. Une cinquantaine de personnes est amassée dans la cour intérieure. Toutes ont les yeux rivés sur les deux écrans accrochés sous les auvents en bois et s’égosillent pour l’une ou l’autre équipe. J’ai à peine de le temps d’inspecter les lieux - un bassin plein de poissons avec une fontaine au milieu, des bancs en céramique, deux nébuleux barbecues qui tournent à plein régime, des jambes en string rouge peinte sur le mur de la laverie, un petit cabanon pour les parades de mardi gras, une piscine où il est interdit de plonger, des douches et des toilettes comme au camping - que je me retrouve avec une bière et un hot dog dans la main. Bayonne, le rugby, la sangria et le bocadillo ne sont pas loin... Vive le Sud !
* Navettes
** Les trois principaux ouragans qui ont frappé la ville
*** tram aussi appelé trolleybus
NDLR : Je n'ai pas pu faire de photos lors de ma première soirée à New Orleans. Les images qui illustrent ce post ont été prises dans les jours qui ont suivi mon arrivée.
2 commentaires:
YOUHOUUU !!!! T'es vraiment en forme Delph Delph ! EXCELLENT cet article, tu t'es déchaînée Quelle plume ! et vraiment rien n'échappe à ton coup d'oeil, je suis impressionnée
La suite ! La suite !
j'adore ! je suis impressionnée par la façon dont tu nous transmet ton ressenti et tes émotions,c'est génial de pouvoir partager tout ça avec toi! j'attend la suite avec impatience!
au fait les"bleus "sont en demi finale et j'ai retrouvé Fred aux commnentaires avec bonheur!!!
kiss
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