jeudi 1 janvier 2009

"Welcome to the United States of America"


L’avion vient de se poser. Etonnante ponctualité : 25 minutes d’avance sur l’horaire prévu. Je rassemble mes affaires et salue une dernière fois mon bavard roumain. Jamison, un ami rencontré à Keele pendant mon année Erasmus en Angleterre, ne s'impatientera pas. C’est certain. Un bus nous conduit vers le terminal d’arrivée pour la toute dernière étape avant de réellement poser le pied sur le sol américain : la douane. Pour être honnête, je ne suis pas hyper à l’aise. Loin de moi l’idée de vouloir tromper la vigilance des douaniers, mais les quelques expériences révélées par des amis me laissent penser qu’il faut rester vigilant et concentré.

Je pénètre dans la fameuse zone de contrôle. Bondée. Notre avion, 300 passagers environ, vient grossir allègrement l’interminable zigzag. A droite, les détenteurs de la citoyenneté américaine. Heureux élus, la file défile à bonne allure. A gauche, les non-états-uniens, les plus nombreux, les plus questionnés. Une petite douanière au pantalon remonté jusqu’au nombril s’agite pour répartir les prétendants au passage. Son phrasé puissant et distingué raisonne dans l’immense salle. « Make sure you’ve filled the good form and you have your passport and other documents ready for the inspection !!* » Je prends place dans la queue de gauche. Cinq minutes, dix minutes, quinze minutes, je n’ai pratiquement pas avancé. Jamison doit être arrivé maintenant. Suspendus au plafond, des écrans de télé diffusent en boucle les instructions à suivre : rester naturel (facile à dire), être concentré sur ce que le douanier demande (si j’arrive à le comprendre), répondre par oui ou par non à ses questions (toutes ses questions vraiment ?), déclarer toute chose qui nécessite de l’être (parfaitement clair), ne pas importer de nourriture (les gaufrettes au chocolat achetées à Vienne pour mon voyage et restées dans mon bagage à main commencent à me faire transpirer), si l’on vous interpelle pour une fouille approfondie de vos bagages, suivez calmement les agents (pour aller où ??). Trente minutes, je suis à mi-parcours. Je m’accroche vigoureusement à mes deux formulaires ; le vert pour mon passeport, le gris pour la douane. La petite vidéo se poursuit, c’est le passage sur la prise des empreintes digitales. J’ai l’impression d’avoir commis un crime. Il fait de plus en plus chaud. Et pour finir, une petite photo pour les archives ! Le tout présenté sur un ton suspicieusement rassurant. Ca va aller, ça va aller.

Au bout d’une heure, j’arrive enfin à la fameuse ligne jaune. Jamison doit s’impatienter… Un dernier coup de stress, les bons formulaires, rester naturelle, le passeport, rester naturelle, la bonne adresse, rester naturelle. Une douanière, plus jeune, m’interpelle dans un français étonnamment parfait (elle a dû voir mon passeport prêt à être dégainé). C’est à moi. Je m’approche de la petite cabine où m’attend mon bourreau. Je tends péniblement mes documents. L’agent reste de marbre. Il manipule mon passeport dans tous les sens. Rien à signaler. « Quel est l’objet de votre séjour aux Etats-Unis ? » J’hésite à lui faire le topo sur mon tour du monde, je me ravise… « Des vacances ». « Combien de temps restez-vous sur le sol américain ? ». « Un mois ». Il tapote sur son ordinateur. Un collègue derrière lui me sourit comme pour me rassurer. C’est au tour des empreintes. La main droite. Les quatre doigts d’abord. Ok. Le pouce. Ok. La main gauche. Les quatre doigts. Ca ne marche pas. Les quatre doigts. Ca ne marche toujours pas. Sueurs froides. LES QUATRE DOIGTS. Ca marche enfin ! Le pouce. Ok. La séance se termine avec la photo. Un beau sourire, crispé. On me rend mon passeport. « And welcome to the United States of America ». C’est tout ??? Pas de fouille au corps, ni scanner, ni test ADN ? Tout ça pour ça…

Soulagée, je franchi enfin cette p%$£% de frontière ! Il ne me reste plus qu’à récupérer mon bagage. Mon sac trône au milieu de dizaines de valises qui attendent leurs propriétaires depuis d’interminables minutes. Je dirige mon chariot vers la sortie. Une dernière vérification de mon passeport avant la délivrance. J’accélère le pas dans le long couloir qui mène au point rencontre. J’inspire, les portes s’ouvrent. Le patient Jamison est à quelques mètres, sourire jusqu’aux oreilles. Ca fait 4 ans qu’on ne s’est pas vu. J’expire : « I am in the United States of America !! »

* « Assurez-vous d’avoir rempli le bon formulaire et que votre passeport et autres documents sont prêts pour l’inspection !! »

6 commentaires:

Yachar a dit…

C'est vraiment dommage qu'un pays aussi sympa à la base soit devenu une telle forteresse... ridicule.
Enfin ne te plains pas, tu aurais pu t'appeler Yachar tu aurais eu droit à la fouille au corps ;-)

livabroad a dit…

Pour être passée par la y'a à peine de 2 mois, c'est trop vrai tout ce que tu dis. Au passage, belle plume !
Il me tarde de lire la suite sur tes aventures en Louisiane ++

Delphine a dit…

@ Yachar. C'est clair!!! J'ai quand même eu peur d'y passer... Heureusement la frontière est aussi chiante et stressante que le pays est hyper cool! Ca vaut quand même la peine de stresser pour quelques gaufrettes restées au fond de mon sac! A plus!

Olivier J. a dit…

Salut Delphine,
Bon, j'crois que je suis comme Hélène. Faut avoir fait Saint Cyr pour t'écrire !!!
Je rentre de vacances et ton arrivée aux US m'a bien fait rire.
J'ai l'impression de revivre mon passage à la frontière d'il y a un an pour la finale de Coupe Davis.
En tout cas, je te souhaite une bonne et belle année pleine d'aventures.
Bises à toi
Olivier J.

Lúcia a dit…

Mon Dieu, ton blog est le meilleur que j'ai jamais vu! Mes félicitations, c'est super bien fait, vraiment professionnel!
A part ça, c'est trop marrant d'accoagner tes joies et angoisses! Tout va bien se passer, t'inquiete!
Biz!!! Profites en!!
Lúcia

Delphine a dit…

Merci à tous pour vos commentaires et remarques bien sympathiques!! Je suis un peu en décalage, mais j'y bosse!! Biz à tous!!