mardi 17 février 2009

San Antonio – Chicago, choc thermique deuxième !

Adieux les 25°C tempérés du Texas ; dès ma descente de l’avion, je dois affronter les minus* du Michigan. Un bon petit -15°C pour ma première après-midi ensoleillée. Les pieds dans la neige, j’attends le bus qui doit me conduire à l’Université de Chicago. Je dois y retrouver Tim, ami d’Eliot, lui-même ami de Lopaka. Les fameux amis d’amis. Tim et sa femme Sarah me logeront pendant mon séjour à Chicago.

Trajet sans encombre, le quartier de l’Université est facile d’accès. Quasi tout droit depuis l’aéroport. Je me décharge dans le bureau de mon hôte (sac toujours aussi encombrant) et vais patienter dans une cafèt’ de l’Université, le temps que Tim boucle sa journée de travail. La salle ressemble à celle de Harry Potter. Mobilier en bois, style gothique, murs de pierre, plafonds à bonne hauteur et tableaux d’illustres (in)connus. Petite session skype avec la famille, réponse à d’innombrables mails en retard, un peu d’écriture, l’après-midi passe incroyablement vite.

A ma sortie du bâtiment, la nuit est tombée. La voiture de Tim s’extirpe péniblement de sa place. La neige collante s’y était bien installée. Remontée fantastique le long du lac Michigan, à moitié gelé, vers le nord de la ville. A gauche le Loop et sa skyline irradient. Partout des loupiotes dévoilent les formes longilignes des buildings. Sorte de prélude à ma balade diurne du lendemain. Chicago by night, un délice pour les yeux. Une bonne demi-heure de route et nous arrivons dans le quartier de Lincoln Square. Encore plus de neige. La question parking s’annonce compliquée, mais tous les moyens sont bons pour conserver sa place du matin. Pour Tim, une petite chaise à fonction d’épouvantail aura fait l’affaire. Personne n’a osé déplacer l’effrayant ustensile. L’appartement n’est qu’à quelques foulées.


L’on attend le retour de Sarah autour d’un verre. L’accueil est plus que chaleureux. Le jeune couple est marié depuis deux ans. Tous deux vivent à Chicago depuis leur enfance. Conseils, cartes et petits trucs pour faciliter ma visite. Tim et Sarah sont francophiles jusqu’aux murs de leur appartement. Une photo de la station Pasteur habille le salon. Souvenir d’études à Paris. A Chicago, je dormirai à deux stations de chez moi.


* températures négatives
** ligne 6 du métro parisien

lundi 9 février 2009

Before and after Fort Alamo

San Antonio, Texas. Prochaine escale de mon voyage aux US. L’Etat à l’image certainement la plus stéréotypée que nous, français (et européens), avons de tous les Etats-Unis. La faute à un certain G.W.B. Déjà dans le Greyhound qui me mène à l’ancienne ville mexicaine, des chapeaux de cow-boy, des santiags et des accents à couper au couteau. Le trajet depuis New Orleans n’est pas si long (huit heures), mais mon départ tardif de Louisiane me vaut un beau stop de quatre heures à Houston, entre deux et six au beau milieu de la nuit. Première expérience sympathique du fameux bus gris.

Pourquoi ce choix de ville ? DIANA, mon amie co-captain de l’équipe des Keelers en Angleterre (football). Cela fait 4 ans que l’on ne s’est pas vu, mais malgré la distance nous avons toujours gardé contact. La Mexicana m’accueille à l’arrivée. Elle sort du boulot, toute chic avec sa veste immaculée et ses lunettes de star. Trop bon de se retrouver. Une impression de s’être quitté la veille. Troisième Keeleuse sur ma route américaine.
Le Mexique n’est pas inscrit à mon itinéraire, mais j’ai l’impression de découvrir le Texas avant Fort Alamo ! A San Antonio, je suis à Mexico.

A commencer par la cuisine, une passion que Diana et moi avons en commun. Ces six jours se transforment rapidement en tour gastronomique et Diana est le meilleur guide qui soit. Pour les mets plus classiques : tacos, quesadillas, guacamole. Mais attention, pas les imitations made in France ou la malbouffe texmex. Maïs et avocat sont tellement plus goûteux. Pour les découvertes : tamales (gâteaux de maïs cuits à la vapeur dans des feuilles de maïs. Idéal pour démarrer la journée), mole poblano (poulet à la sauce au chocolat épicée, préparé par la maman d’Adriana, une autre amie mexicaine de Keele. UNE TUERIE !). Pour se désaltérer sans alcool : agua jamaïca (eau aromatisée à la fleur d’ibiscus), horchata (une sorte de lait de riz, excellent pour la digestion). Et enfin, pour s’abreuver, avec modération : Corona, Margarita et autres cocktails à base de tequila.

Qui dit breuvage, dit fiesta. Là encore, Mexico n’est pas très loin. Diana m’entraîne un premier soir dans un bar flamenco. Une petite sangria et une intense démonstration plus tard, nous voilà dans une boite à quelques pas. Un de ses proches amis est l’un des actionnaires. La soirée est à nous. L’accueil des Mexicanos est incroyable. Nos origines latines communes y sont certainement pour quelque chose. Je commence avec l’anglais, mon castillant est encore trop hésitant. Mais à mesure que la soirée avance, il fait un retour fulgurant. Etonnant. L’occasion d’une petite initiation aux danses latines. Difficile de trouver un cavaillero qui ne sache pas danser. Tous se dandinent avec grâce et conduisent sur rythme naturel les débutantes dans mon genre. J’ai l’impression d’être la reine de la piste. Ce n’est qu’une impression, mais je m’éclate. La soirée se terminera au petit matin… à 6 heures.



Le lendemain, samedi soir, direction Austin, la capitale de l’Etat. On doit y retrouver une amie d’enfance de Diana, Paulina. Elle organise une soirée avec deux autres copines mexicaines dans leur appart, Karen et Sofia. Il paraît que les soirées à Austin sont mémorables, je vais en avoir un bel aperçu. Lorsque l’on franchi les portes, la soirée est déjà bien avancée et l’accueil est toujours aussi chaleureux. L’assistance est beaucoup plus cosmopolite. Mexicains, Américains, Australiens, Polonais et autres Sud Américains ont l’air d’avoir passé plus d’une soirée ensembles. Leur dénominateur commun : parler le castillant ou presque. C’est marrant de voir les gringos se mettre à la salsa et tenter de concurrencer leurs voisins du sud. L’ambiance est incroyable, les rencontres également. Je récupère quelques cartes et adresses pour la suite de mon voyage, en Australie notamment. Vers 23 heures, plus de musique, on change pour le Catch Phrase ! Une variante du tabou. Le principe : former un cercle et se passer un rond en plastique sur lequel apparaît un mot qu’il faut faire deviner aux membres de son équipe (sans bien évidemment prononcer de mot qui y ressemble). Quand le mot est trouvé, passer la palette à son voisin qui tape dessus et un nouveau mot apparaît. Le temps défile et l’équipe qui se retrouve avec l’objet entre les mains perd la manche. Ce soir, c’est garçons contre filles et en dans la langue de Shakespeare s’il vous plaît. Le jeu démarre. Le rond passe de mains en mains à une vitesse fulgurante sans que je ne comprenne ou ne trouve un seul mot. Je commence à douter de mon anglais. Encore deux. Encore un. C’est à moi ! Je frappe la soucoupe et avec la plus incroyable ironie, voilà le mot que je doit faire deviner : suitcase ! Il fallait forcément que ça tombe sur moi. Easy. Bagage ! Lugage ! Mes co-équipières trouvent en cinq secondes, des cris et sauts de filles partout ! Surréaliste. Moyenne d’âge ? Environ vingt-six ans. Le jeu se poursuit et se termine quelques verres plus tard. Comme toujours, les filles pensent avoir gagner et les garçons le contraire. La soirée se poursuivra dans quelques bars de la fameuse sixième rue. Mémorable, effectivement.

Il n’y a pas que la fête dans la vie, il y a la culture aussi.

Et San Antonio résume à elle seule les liens qui unirent au fil des ans cultures mexicaines et américaines, de ses fondateurs à ses actuels occupants. Sous une chaleur pesante, Diana et son GPS nous mènent sur la route des Missions. En 1718, Franciscains et Espagnols établirent des missions le long de la rivière San Antonio dans le but d'éduquer et christianiser les Indiens qui vivaient sur ces terres. Leur but ultime était d'en faire des citoyens espagnoles. Selon le park national, les Franciscains auraient protégé les natifs conre l'armée et le gouvernement américains. San Antonio doit ainsi son existence aux missions franciscaines.

Nous en visiterons quatre. La toute première, Espada, sera ma préférée. Petite. Paisible. A côté de l’église, un étroit patio couvert de fleurs dénote avec l’ambiance western desséché des alentours. Le clocher offre son ombre, la végétation semble apprécier. L’arbre imposant devant la partie rénovée carillonne. De l’édifice s’échappe de la musique classique. Difficile de résister à l’envie de pousser la porte. A l’intérieur, la simplicité à l’état pure. Murs blancs et plafond en poutre. Quelques crucifies en bois marquent le chemin. Les bancs craquent. Les fleurs rouges sentent bon. Noël est encore présent. Le temps semble s’arrêter.



L’autre point historique de San Antonio, c’est bien évidemment Fort Alamo. Petit point d’histoire. Avant de devenir américain, le Texas appartenait au Mexique. En 1836, un peu moins de deux cents hommes à la conquète de nouveaux territoires et aidés par des aventuriers (dont David Crocket), se retranchèrent à Alamo et affrontèrent jusqu'à la mort l'armée mexicaine, forte de cinq mille soldats. Les américains livrèrent une bataille telle qu'ils parvinrent à tuer six cent mexicains. Impressionné par leur courage, le gouvernement américain envoya des troupes pour venger la mort des héros. Cette guerre conduit le Mexique à perdre cette partie de son territoire. La République Indépendante du Texas fut proclamée cette même année, avant son annexion par les Etats-Unis en 1845.


Les dégâts furent considérables pour la mission devenue camp militaire. La partie qui se visite aujourd’hui est en fait une reconstitution de ce à quoi ressemblait le fort à l’époque. Le jardin, en plein cœur de la ville, est particulièrement apaisant. A la sortie, un Texas Ranger veille. Sa moustache est trop séduisante, la photo s’impose. Mission accomplie Le Gonz’ !



Mon voyage n’aurait pas été le même si je n’avais pas assisté à un match des San Antonio Spurs du Frenchy Tony Parker. En pleine saison de basket, s’eût été un crime ! Nos places sont royales. A mi-hauteur dans un coin. L’on peut pratiquement toucher les joueurs. Ambiance surchauffée dans la salle. A l’entrée du français sur le terrain, la salle se soulève. Impressionnant. Les stars de l’équipe sont toutes là. Show à la NBA : Pom-pom girls, danseurs hip hop, démos de un contre un et lancers à trois points, kiss cam, lancers de t-shirts, hot-dogs, gadgets en tout genre. Sur le terrain, les Spurs sont à la peine. TP sort quelques classiques. Duncan manque les shots, Ginobili n’arrive qu’à la mi-match. En face, les LA Clippers ne profitent pas du jeu nerveux des receveurs. Les californiens sont en tête une bonne partie du match, mais se font passer en fin de rencontre par des Spurs qui n’ont qu’à hausser d’un poil leur niveau de jeu pour ne pas décevoir leur public. Courte victoire, mais victoire quand même. TP aux US (sans Eva), c’est quelque chose !

Si mon séjour à San Antonio fut culturellement très mexicain, j’ai cependant vécu une expérience bien américaine : franchir la porte d’un magasin d’armes, histoire de me faire ma propre opinion. L’entrée dans le magasin est vraiment effrayante. Je peux à peine tenir un pistolet en plastique alors imaginez moi au milieu des fusils d’assauts, armes de points, magnum géants et révolvers en tout genre. Le propriétaire, sexagénaire, à l’air sympathique. Son regard azur est rassurant. Je me présente : petite française en vacances qui n’a jamais vu pareil endroit et qui souhaite comprendre le pourquoi du comment. Pas de clients derrière nous, il prend le temps de bien nous expliquer les choses.

Tout citoyen américain au casier vierge est en droit de posséder une arme, plusieurs même. Aucune limite de calibre, tout est bon à acheter tant qu’on n’a pas de casier. Et un étranger ? Interdit. Comment on fait pour vérifier ? Avant l’achat, le vendeur passe un coup de fil au service administratif concerné pour vérifier les antécédents du futur acquéreur. Et l’enregistrement des armes, ça se passe comment ? Il n’y en a pas. Constitution oblige. Le premier à enregistrer les armes, c’était Hitler. Merci pour la leçon d’histoire. Passons les questions faciles, on va lui rentrer un peu dedans. Quel est l’intérêt d’avoir une arme ? Protéger sa famille. De quoi ? De personnes malintentionnées. Mais vous ne pensez pas que c’est la libre circulation qui conduit à un climat d’insécurité ? Non parce que dans ce cas là, seuls les méchants garçons possèderaient des armes. C’est le serpent qui se mort la queue. Autre approche. Qu’en est-il de la maîtrise de l’arme elle-même ? Là je touche le point sensible. Le monsieur aux cheveux gris m’explique que si les américains qui possédaient une arme avaient vraiment conscience de la responsabilité que cela entraine et passaient plus de temps à apprivoiser leurs armes, les personnes comme moi n’auraient pas grand chose à redire. Intéressant. Il ajoute qu’un soir par semaine, il prend en charge un groupe de femmes et leur enseigne l’auto-défense. Les premiers cours, ces femmes les passent sans tirer. Il faut d’abord s’habituer à porter une arme. Si tous les vendeurs étaient comme lui… Avez-vous déjà tué quelqu’un ? « Non. Mais j’aurais pu. Une nuit, j’ai entendu du bruit dans ma boutique. Je dors au dessus. Je suis donc descendu et j’ai aperçu une ombre. J’ai eu une seconde pour allumer la lumière et un quart de seconde pour me rendre compte que l’homme qui était entré dans ma propriété n’était pas armé. J’avais le doigt sur la détente, mais je n’ai pas tiré. Je lui ai dit de déguerpir sinon j’appelais la police. J’avais une arme, mais toutes mes années de pratique et mon self-control lui ont sauvé la vie cette nuit-là ».

Nous sommes en désaccord total sur le principe même du port de armes et surtout de leur libre circulation. Mais cet homme, tout aussi dangereux qu’il est à soutenir une cause à laquelle je n’adhérerai jamais, tient plutôt un raisonnement sensé. L’exception qui confirme la règle ? Il me propose d’aller tirer quelques balles dans la salle d’entraînement. « I can’t. It’s against my believes* ». Poli et calme jusqu’au bout, il m’offre une casquette à la place. C’est ça l’Amérique.


* Je ne peux pas, c'est contre ce en quoi je crois

mardi 3 février 2009

French Quarter, de nuit

Sur la lancée d’une magnifique journée passée dans le Vieux Carré, je m’apprête à découvrir la fameuse vie nocturne de la rue Bourbon. Resto et bars repérés sur Internet. Je suis d’humeur joyeuse et décide de m’y rendre à pied. Le soleil entame tout juste sa descente. Je m’élance donc sur Canal Street pour quarante minutes de marche en direction du jazz néo-orléanais. L’excitation est à son comble. Le trajet est simple : tout droit jusqu’au croisement avec la rue Bourbon.

Après dix minutes de marche, je passe une station essence. Des jeunes en demi-cercle autour d’un coffre de voiture se balancent de gauche à droite. Boîte à rythme à fond, ils rappent, improvisent, gesticulent. On se croirait dans 8 miles*. Quelques minutes plus tard, de l’autre côté de la rue, une voiture de police se met à couiner pour arrêter le véhicule qu’elle suivait. La nuit tombe de plus en plus. Immobilisés au bord du trottoir, les conducteurs s’observent depuis l’intérieur de leurs habitacles. Le policier ouvre enfin sa porte et se dirige lentement vers l’interpelé, la main sur le côté parée à réagir. L’autre conducteur, un jeune noir, a les deux mains sur le volant et obéit aux ordres. Il sort de sa voiture, se retourne, pose les mains sur le toit, écarte les jambes. Fouille au corps et menottes indispensables le temps de la vérification des papiers. Comme dans les films. Le manège semble durer une éternité. Finalement, le blanc policier n’a rien à lui reprocher. Le jeune file sans broncher. Putain.

La musique n’est plus qu’à quelques blocks. Il fait totalement nuit. Bourbon street, enfin. Je passe les bars et restaurants les uns après les autres jusqu’à trouver celui que j’ai repéré. Devant les établissements encore vides, des chasseurs criards qui tentent de m’amadouer. Apparemment le dimanche soir, c’est three for one. Mes oreilles me dissuadent. Le Cajun Cabine, à qui je me destine ce soir, attend encore ses clients. A l’intérieur, tout est en bois. Au fond du resto, une scène. Le groupe de blues est plutôt accueillant. Je m’installe à quelques tables.

Un serveur m’apporte la carte : petite bière et poisson chat au menu. La musique me fait patienter. Sur les écrans de télé, encore du foot américain. Les professionnels cette fois-ci. La fausse arrestation à laquelle j’avais assisté quelques instants plus tôt est maintenant loin. Je décompresse et profite. Petit diner agréable, sans prétention.

Le cat fish est bien passé, la petite bière aussi. Je remercie le groupe avec un pourboire, le serveur aussi. Envie d’un peu plus de musique. Je sillonne la rue Bourbon dans l’autre sens. C’est le méga choc. Partout des gens qui entrent et sortent. Par terre, des gobelets abandonnés. Encore plus de chasseurs pour rabattre la clientèle. Le volume, déjà conséquent une heure auparavant, est multiplié par trois. Des jeunes avinés chantent et paradent bras dessus, bras dessous. Difficile de se décider au milieu de ce capharnaüm. Je me sens un peu déconnectée. Un homme d’une cinquantaine d’année qui marchait devant moi se retourne et me repère. Il fait mine d’être intéressé par une vitrine et m’accoste. Je fais semblant d’être super à l’aise. Trois fois il me fait répéter mon prénom, mais ne le comprend toujours pas. « Are you by yourself? ». Il cherche une compagne pour la nuit. « No, i’m meeting friends just there, in this bar. Have a good night »**. Je l’abandonne et rentre dans le premier bar venu, à la recherche de mes amis imaginaires. Le jazz sonne bien, mais je ne suis plus vraiment dans l’ambiance. Il est à peine 22 heures et déjà les vicelards sont de sortie. J’attends encore quelques minutes et me décide à rentrer à l’hôtel. Le coin n’est pas hyper safe pour les femmes seules.

A la sortie du bar, une demoiselle en porte-jarretelle patiente devant une porte couverte de filles nues. Les deux malabars qui l’entourent n’ont pas l’air commode. Encore des regards de vieux pervers. Les étudiants sont à l’intérieur. Pas de groupes auxquels je pourrais me raccrocher. J’accélère le pas vers le tram. Un jeune black joue du trombone au coin de Canal Street. C’est incroyable. Il est littéralement possédé par son instrument. Petit moment apaisant en attendant le trolley bus…

… qui ne viendra jamais. Solution taxi abandonnée après vingt nouvelles minutes d’attente. Vive le dimanche soir ! Je dois marcher. La rue est éclairée, ça devrait aller. Et puis, je pourrai toujours sauter dans le premier tram qui passe. A mi-chemin, je suis confiante. La lumière est toujours là, personne ne m’a encore interpellée. Je déchante assez rapidement. Les trottoirs changent et n’ont plus vraiment des têtes de trottoirs. Les lampadaires sont de plus en plus distants les uns des autres. De-ci, de-là des groupes de latinos qui fument et me sifflent au passage. Je suis vraiment trop conne… Au milieu de la route, sur les rames du tram, je repère un jeune, apparemment dans la même situation que moi. Je quitte donc le côté pour le centre de la rue et me cale sur sa foulée. Il ne le saura pas, mais je pense qu’il m’a bien sauvé la mise ce soir-là. Je retrouve South Lopez et l’India House avec émotion.

Il ne m’est rien arrivé ce soir, mais ça aurait pu mal tourner. Naïveté évidente et impardonnable. La leçon est tirée, mais je garde un goût amer de cette soirée pendant laquelle j’ai découvert l’autre visage de la Nouvelle Orléans. Celui qui porte apparemment les stigmates de Katerina, pour en avoir discuté plus tard avec certains colocataires. Loin de moi l’idée de vouloir généraliser à toute la ville l’ambiance vraiment malsaine que j’ai pu ressentir. Accompagnée et bien renseignée sur les lieux où sortir, j’aurais certainement vécu cette soirée complètement différemment. Il reste que les belles maisons aux balcons en fer forgé n’ont plus du tout la même saveur.

* Le film du rappeur Eminem
* "Tu es toute seule?". "Non, je dois retrouver des amis dans ce bar, là. Bonne soirée".